2009-05-26

Abus de pouvoir - François Bayrou













Plon

Avril 2009

Il est rare de lire un essai politique aussi bien écrit d'un point de vue littéraire. Et rare d'être autant maintenu en haleine également. François Bayrou démontre dans son ouvrage que contrairement à ce que certains des détracteurs de Nicolas Sarkozy disent, ce dernier ne fait pas n'importe quoi, mais qu'au contraire il a un plan. Un plan qui se résume à phagocyter tous les pouvoirs pour imposer son modèle de société. D'où le titre, "abus de pouvoir", pouvoirs politique, juridique, médiatique, financier...

Ce modèle de société, Bayrou s'efforce de démontrer que c'est un "projet inégalitaire" à la place du modèle français. Là est la "rupture" annoncée par Sarkozy lors de sa campagne. Rupture avec moins de démocratie (confiscation du pouvoir, du contre-pouvoir et mise à mal de la séparation des pouvoirs), moins de laïcité et moins de social. C'est finalement la reprise par Sarkozy l'Américain du modèle états-uniens des "inégalités croissantes". Modèle qui a fait tomber l'idée (la croyance ?) que le "progrès économique allait peu à peu réduire les inégalités et peut-être un jour [les] effacer". Ce projet inégalitaire, il est d'ailleurs assumé par le Président : "une société égalitaire, c'est le contraire d'une société de liberté et de responsabilité" (discours de mars 2009). Où est passé le triptyque Liberté, Egalité, Fraternité ?

Fraternité de classe peut-être, puisque pour reprendre ce que dit Warren Buffet aux Etats-Unis, "la lutte des classes est menée par les plus riches et ils la gagnent". Combien d'autres preuves que le bouclier fiscal, la réduction de l'impôt sur les successions ? Minc avait déjà théorisé le modèle en 1994 dans la France de l'an 2000 : "trouver le niveau d'inégalités nécessaires pour assurer le dynamisme de l'économie". Inégalités qui n'ont jamais que fait naître la crise actuelle, comme le prouve Bayrou : "la crise naît d'une bulle, et la bulle ce sont les inégalités" (on peut aussi renvoyer aux "Bullocrates" de Jean-François Kahn, depuis passé avec armes et bagages chez le leader centriste).

On ne s'étonnera pas que Bayrou démontre également la mise en place d'un culte de l'argent, que ce soit via la scène "primale" du Fouquet's ou la célèbre phrase de Séguéla. On s'émerveillera des multiples références et citations, dont celle d'Hannah Arendt en 1967 : "la liberté d'opinion est une farce si l'information sur les faits n'est pas garantie et si ce ne sont pas les faits eux-mêmes qui font l'objet du débat". Dans son projet, Bayrou appelle d'ailleurs à s'en tenir à la proposition du Conseil National de la Résistance : "mettre la presse à l'abri des influences étrangères, de l'Etat et des puissances d'argent". Au même moment où le Président se comportait honteusement au plateau des Glières.

Finalement Bayrou propose le concept amusant et pénétrant d'égocratie ("Ego, moi je, et cratie, gouverne. Je gouverne, moi je"). Un concept éminemment pertinent après celui de monarchie élective de Joffrin de Libération. Avec une pique sur une autre copie du modèle américain, le spoil system : "les fonctionnaires ne servent pas l'état, mais un parti".

Sur le sujet projet, Bayrou est plus disert (ce n'est pas l'objet de son livre). Il dresse de grandes orientations de l'Etat, d'une façon qui semble libérale ("Au lieu de l'Etat qui s'occupe de tout, je demande des décisions qui font charpente"). A noter, l'évocation d'une réforme des échelons de fonctionnement (local, régional et national). Il s'agit plus là de grands principes réaffirmés (de présidentiel) que de mesures concrètes (de premier ministrable). En toute logique.

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Millenium T1 - Stieg Larsson











Plusieurs mois après la déferlante Millenium et, par coïncidence, en même temps que la sortie du film, j'ai donc lu le premier volume de la saga Millenium, "The girl with the Dragon Tatoo". Une obligation morale puisque sans le lire, je l'avais qualifié d'être à la littérature ce que McDonald est à la nourriture. Le livre est donc effectivement divertissant, mais pas exceptionnel. Un bon page-turner, qui déçoit un peu à la fin (tout ça pour ça...) et qui n'évite pas certaines longueurs. On peut également regretter que les deux intrigues ne soient pas plus que cela liées et que l'auteur peine pour finir son livre.

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